Les chercheurs de l’EPFZ luttent pour la préservation de la biodiversité, notamment dans le cadre de projets comme le Crowther Lab. Leur engagement joue un rôle fondamental dans la gestion de cette crise mondiale qui touche également la Suisse.
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Nos ressources vitales sont menacées
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Nos ressources vitales sont menacées
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• • Anja Ruoss et Elmar zur Bonsen, Sustainable Switzerland Editorial Team
La vie sur Terre a déjà traversé cinq épisodes d’extinction de masse suite à des impacts d’astéroïdes, des éruptions volcaniques dévastatrices ou diverses catastrophes naturelles. La disparition des dinosaures, il y a 66 millions d’années, en est l’exemple le plus célèbre. Parmi les spécialistes, d’aucuns soutiennent que nous assistons actuellement aux prémices de la sixième grande extinction.
A minima, nous pouvons affirmer avec certitude que les êtres humains sont responsables d’un déclin généralisé de la biodiversité. On estime que 60% des écosystèmes mondiaux se sont dégradés au cours des 50 dernières années. Selon les Nations Unies, ce sont 100 à 150 espèces animales et végétales qui disparaissent irréversiblement, chaque jour. En l’absence d’une mobilisation générale pour protéger la nature, il est probable que cette tendance continuera à s’accélérer dans les décennies à venir. Plus de deux millions d’espèces d’animaux, de plantes et de champignons – soit environ un cinquième de toutes les espèces de la planète – sont au bord de l’extinction sous les effets du changement climatique, de la pollution, mais aussi de l’expansion des êtres humains dans des écosystèmes de plus en plus fragilisés.
De vastes ensembles de données
L’effondrement de la biodiversité entraîne des conséquences très graves. «Tous les aspects de notre vie dépendent directement ou indirectement de la biodiversité», explique Thomas Crowther, professeur en écosystèmes globaux, fondateur et directeur du Crowther Lab à l’EPF de Zurich. Ce scientifique de 38 ans parle en connaissance de cause: lui et son équipe étudient la biodiversité en Suisse et documentent les changements imputables au réchauffement climatique. M. Crowther fait partie de la génération d’écologistes dont le travail repose sur de vastes ensembles de données et des algorithmes complexes.
Cet écologiste originaire du Pays de Galles est professeur assistant à l’École Polytechnique Fédérale de Zu- rich (EPFZ), dans le département des sciences de l’environnement. Le cher- cheur de 38 ans y a également fondé le Crowther Lab, un groupe interdis- ciplinaire de scientifiques dont les re- cherches portent sur la biodiversité et le changement climatique. En 2021, Thomas Crowther a été nommé «Young Global Leader» par le Forum écono- mique mondial pour son travail de pro- tection et de restauration de la biodiver- sité. Six ans plus tôt, il s’était fait remar- quer avec un modèle révolutionnaire qui associait les données satellitaires aux connaissances en recherche environne- mentale. Il avait réussi à calculer pour la première fois le nombre d’arbres sur la planète, à savoir 3000 milliards. En 2019, son travail sur le potentiel de res- tauration des arbres dans le monde a fait sensation. M. Crowther et son équipe avaient calculé la possibilité théorique de reboiser naturellement 0,9 milliard d’hectares avec 1000 milliards d’arbres de manière à absorber d’énormes quan- tités de carbone de l’atmosphère.
Le laboratoire zurichois conduit une recherche interdisciplinaire et formule des conclusions à la convergence de plu- sieurs domaines. «Nous étudions le mi- crobiote du sol avec des microscopes et des écosystèmes entiers grâce aux satel- lites. Nous conduisons à la fois des ex- périences sur le terrain, mais aussi des modélisations informatiques», explique M. Crowther. Les écosystèmes alpins constituent un axe de recherche impor- tant. «Mais nous consacrons aussi une grande part notre travail à la biodiversité dans les forêts tempérées. Ces dernières abritent les écosystèmes les plus diversi- fiés de la planète et stockent d’énormes quantités de carbone, un atout impor- tant dans la lutte contre le changement climatique.»
Quand il parle de la Suisse, Thomas Crowther s’extasie: «Des sommets ma- jestueux aux vallées millénaires, ce pays offre de nombreux habitats, avec une faune et une flore variées.» Cela repré- sente 56000 espèces différentes, champi- gnons et lichens compris. Selon le cher- cheur, cette biodiversité est indispen- sable à l’économie du pays: «Elle fournit aux agriculteurs des sols de qualité et des insectes pollinisateurs, ce qui améliore les récoltes. Elle soutient les infrastruc- tures en limitant l’érosion des sols et en régulant le climat. Elle favorise le tou- risme en attirant des personnes qui sou- haitent découvrir la nature dans toute sa splendeur.» Mais nous ne pouvons igno- rer l’envers du décor. En effet, selon une étude de l’Office fédéral de l’environne- ment (OFEV) publiée l’année dernière, «près de la moitié des milieux et un tiers des espèces» en Suisse sont en danger. Ce recul de la diversité des espèces se traduit également par un appauvrisse- ment de la diversité génétique.
La biodiversité
Les habitats naturels et les espèces nous fournissent de la nourriture et de l’eau potable, des substances de base pour les médicaments et régulent le climat. La biodiversité est indispensable pour l’hu- manité. Ce concept recouvre la diversité biologique, à savoir l’ensemble des orga- nismes vivants d’un milieu. On distingue trois niveaux de biodiversité: la diversité génétique (la variation des gènes au sein d’une espèce), la diversité des espèces et la diversité des écosystèmes, qui re- pose sur les interactions complexes entre toutes les espèces qui y vivent. Selon le Crowther Lab, nous traversons actuel- lement une crise de la biodiversité. Plus de 8400 espèces animales et végétales sont menacées d’extinction et environ 30000 autres espèces sont en danger ou nécessitent notre protection. «Nous de- vons promouvoir la biodiversité en res- taurant les milieux et les écosystèmes et en utilisant les ressources naturelles de manière durable».
«Les pertes continuent d’affecter tous les niveaux de la biodiversité», poursuit l’OFEV. Les instruments et mesures engagés jusqu’à présent sont certes «partiellement efficaces, mais néanmoins insuffisants.»
Insectes nuisibles et incendies
Selon Thomas Crowther, les conséquences sont patentes et indéniables: «Sous l’effet de la hausse des températures, nous observons que de nombreuses espèces migrent de plus en plus haut dans l’espace alpin pour retrouver des conditions de vie appropriées.» Ces changements peuvent conduire à la déstabilisation de certains écosystèmes.
«On constate ainsi la propagation de plus en plus fréquente de parasites comme le scolyte. Avec l’assèchement des sols, les risques de feux de forêt augmentent également», avertit M. Crowther. Ce professeur de l’EPFZ ne se considère pas seulement comme un chercheur, mais aussi comme un acteur du mouvement mondial contre l’effondrement de la biodiversité. M. Crowther est notamment membre du comité consultatif de l’initiative «La Décennie des Nations Unies pour la restauration des écosystèmes». Il a également créé «Restor», une spin-off de l’EPFZ qui combine des informations locales sur des projets naturels avec des données de chercheuses et chercheurs d’écosystèmes et des images satellites de Google Earth (voir l’encadré). Grâce à la plateforme en open data, «toutes les données relatives à la conservation et à la restauration de l’environnement sont accessibles sur smartphone». Outre le Crowther Lab, Kristy Deiner, professeure de l’EPFZ, est également engagée pour la protection de la biodiversité. Sous sa direction, l’équipe interdisciplinaire «ETH BiodivX» collecte des échantillons d’ADN dans des habitats naturels et évalue la diversité des espèces dans les écosystèmes.
Les équipes de recherche de l’EPFZ déploient des efforts considérables. Mais suffirontils à protéger la biodiversité, en Suisse et dans le monde? Thomas Crowther se montre optimiste: «Nous sommes la première génération à prendre la pleine mesure de notre impact sur la biodiversité et à initier de véritables changements.»
Un réseau social pour l’environnement
Développée en partenariat avec Google, la plateforme de données ouverte «Restor» recense plus de 32 000 projets de restauration et de conservation. Elle donne un aperçu de la flore d’une région et informe sur les projets locaux.
Déclaration: Ce contenu est réalisé par la rédaction de Sustainable Switzerland pour le compte du partenaire ETHZ.
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